GUILLAUME DE SONAY
vers 1200 - 11 février 1250
Dans l'état actuel de nos connaissances, voici la biographie la plus complète que nous proposons pour décrire la vie de Willelm de Sonay (prononcer : en langue d'oil "vɪ́lhɛlm de so·nay" : vil helm de sonne naille), en langue d'Oc Guillaume de Sonnac et en latin "Willelmus de Sonayo".
Depuis l'origine, les comtes d'Anjou puis les Plantagenets ont utilisé des hommes de confiance pour établir des postes de guets fortifiés à de leur frontières ou près de leurs châteaux principaux. Cette tradition fortement ancrée dans les provinces de l'ouest de la France provenait d'une habitude plus ancienne chez les rois mérovingiens et surtout carolingiens d'employer des lètes saxons bajocasses (de Bayeux) pour assumer cette fonction. Ces fortifications avancées avaient souvent gardé leur nom dérivé du saxon : "Sonay" (Sonne ou Senne = borne, frontière) et étaient tenues par des familles dont le guet et la fabrication d'armes était la spécialité. Le comte d'Anjou Foulque III Nerra (~972-1040) puis ses successeurs ont anobli ces hommes de confiance certainement en récompense des services rendus.
C'est ainsi qu'il est vraisemblable que Willelm de Sonay soit issu d'une famille noble plantagenaise d'origine saxonne. Un de ses ancêtres pourrait être Aimery de Saunay ou de Sauné anobli entre 937 et 1026 pour surveiller le fief de Saumur alors ennemi de l'Anjou.
Ainsi, selon plusieurs indices mais contrairement à ce qui est communément admis, il est probable qu'il soit né vers 1200 dans la région limitrophe de l'Anjou-Touraine-Poitou. Sa famille était probablement installée au château de Sonnay depuis 1038, proche de la forteresse royale de Chinon tenue en l'an 1200 par Jean sans Terre et Isabelle d'Angoulême souverains de l'immense empire Plantagenêt alors au sommet de son expansion. Cet empire avait été hérité d'Henry II suite à son mariage avec Aliénor d'Aquitaine. Si l'on retient ces hypothèses, la famille de Willelm de Sonay perdit son château en 1205 suite à la prise de la forteresse de Chinon par Philippe II Auguste. Quelques proches de Willelm resteront en Poitou mais la plupart essaimeront ou iront rejoindre Henri III plantagenet en Angleterre où certains feront la connaissance de Boniface de Savoie et de son frère Pierre II. Chassée de Chinon, la famille de Willelm se réfugie à Nizeau en Vendée. Assez jeune, Willelm est reçu templier soit en la commanderie de Puyravault soit en celle de Mauléon.
Le 8 janvier 1224 il est recteur (il y avait peut être un précepteur en titre) de la commanderie d'Auzon et, malgré son jeune âge, est choisi pour ses qualités de négociateur par Gérard de Breies précepteur d'Aquitaine afin de le représenter lors d'un litige opposant le précepteur de Sainte-Gemme proche de Maillezais en Vendée à l'abbé de Montierneuf à Poitiers. Willelm de Sonay connaissait bien cette région du sud de Fontenay le Comte car il y avait des parents à Nizeau commune de Velluire.
L'année précédente, en 1223 Geoffroy II d LusignanI dit La Grand-Dent fils de Geoffroy Ier et d'Eustachie Chabot que la légende appellera Mélusine, avait épousé Clémence de Châtellerault fille d'Hugues III vicomte de Châtellerault et d'Eustachie de Mauléon. Il y a tout lieu de croire que Willelm a assisté à ce grand mariage. Dès l'année 1224, Clémence hérite de la vicomté de Châtellerault, son oncle, le célèbre Savary de Mauléon, de la seigneurie de Mauléon et, coté Géoffroy, des châteaux de Mervent et Vouvant. De cette dernière seigneurie dépendait Nizeau, ce qui explique les attaches d'une partie de la famille de Willelm. De plus, le cartulaire de la commanderie de Mauléon (chez l'oncle de Clémence) contient trois actes de donations de Geoffroy II de Lusignan aux Templiers. C'est dire les liens étroits qui devaient unir le précepteur d'Auzon et les époux vicomtes de Châtellerault. Ceci est attesté par la présence des armes de Geoffroy II sur le premier arc doubleau de la chapelle d'Auzon, probablement en remerciement de sa participation à l'agrandissement de la chapelle entre 1236 et 1238.
En 1228 une seconde sentence où Willelm de Sonay représente Gérard de Breies est rendue. Elle concerne également des taxes sur les grains entre la maison templière de Poitiers siège de la préceptorie d'Aquitaine et l'abbaye du Pin près de Béruges. Willelm de Sonay est alors précepteur de la commanderie d'Auzon. Ces deux documents montrent combien Willelm était apprécié pour ses qualités de négociateur et sa connaissance des coutumes Plantagenaises.
Le 11 février 1229 Frédéric II Hohenstauffen récupère par la négociation (traité de Jaffa), Jérusalem, Nazareth et Bethléem mais se brouille avec l'ordre des templiers.
Le 25 mars 1236, certainement pour satisfaire à l'usage suite au déclin des Plantagenêts, Willelm accepte de porter alors le prénom de Guillaume (traduction de la langue d'oc à la langue d'oil). Il assiste à la remise des biens du clerc Willelm de Cerizay avec l'accord de son seigneur Guillaume de la Forêt sur Sèvre à la commanderie de Mauléon (à nouveau) dans les Deux Sèvres. Guillaume de Sonay est alors précepteur d'Aquitaine succédant ainsi à Gérard de Breies. Il est décrit comme un homme vénérable et aimé. Les blasons représentés sur les murs de la commanderie d'Auzon nous font penser qu'il a dû être remplacé à Auzon par Renaud de Vichiers. La longue complicité de ces deux hauts responsables templiers date certainement de cette époque.
Entre 1236 et 1238, il est certain que Guillaume, en tant que précepteur d'Aquitaine, ait été invité par Renaud de Vichiers, son successeur à Auzon, pour l'inauguration de l'agrandissement de la chapelle rendu nécessaire à l'organisation des chapitres provinciaux d'Aquitaine. L'inauguration se serait surement déroulée en présence de Geofroy II de Lusignan.
En 1238, Guillaume assiste à des dons faits à l'ordre par l'abbé Thomas de Saint Sauveur de Villeloin en Touraine. Il est dit alors précepteur du Poitou.
En 1239, Jean IV évêque de Poitiers atteste de la concession de la maison de Velaudon appartenant à la commanderie d'Auzon à Étienne de Saint-Cyr prêtre. Le signataire est Guillaume de Sonay précepteur des maisons du Temple en Aquitaine.
En 1240 Renaud de Vichiers devient commandeur d'Acre puis maître de France en 1242. On ne sait pas qui le remplace à Auzon.
Après le mariage de son frère Alphonse avec Jeanne de Toulouse en 1241, le roi de France Louis IX convoque l'ensemble de la noblesse poitevine à Saumur en vue de l'adoubement de son frère et de sa nomination comme comte apanagiste d'Aquitaine et Poitou. Guillaume, en tant que précepteur d'Aquitaine a inévitablement été invité à cette manifestation grandiose décrite par Joinville et appelée la "Non Pareille" qui a réuni plus de 2000 chevaliers et prélats. En Janvier 1242, Alphonse convoque ses barons à Chinon. Cet acte politique équivaut à une déclaration de guerre compte tenu de l'insulte publique que lui avait faite en 1241 Hugues X de Lusignan comte de la Marche et sa femme (depuis 1220) Isabelle d'Angoulème auparavant épouse de Jean sans Terre et ex-reine d'Angleterre. Hugues X avait en effet refusé avec ostentation de rendre hommage à Alphonse.
Le 4 mai 1242 Louis IX entre dans Poitiers avec 30 000 hommes. Ce fut probablement la deuxième rencontre de Guillaume et de Louis IX. Fut elle cordiale ? Peut être pas compte tenu des relations de notre maître avec les Lusignan dont Geoffroy II vicomte de Châtellerault mais aussi Hugues X et Isabelle d'Angoulème comme nous le verrons plus loin.
En 1242, Guillaume de Sonay accorde la concession d'une maison à Cognac appartenant à la commanderie de Château-Bernard faubourg de Cognac à Helie Gerbert soldat. Il est toujours maître d'Aquitaine à cette date.
En 1243, Guillaume envoie un messager, frère Thomas, à Henry III pour essayer d'obtenir des droits de douane sur le port de Bordeaux en compensation de dommages de guerre subis par quelques commanderies du Sud-Ouest (Torte et Creyssac)
18 octobre 1244, la nouvelle du désastre de la Forbie (près de Gaza), l'emprisonnement (ou la mort réelle) du maître de l'ordre Armand de Périgord, le martyr de 312 chevaliers templiers et des 324 turcopoles décapités et la perte de Jérusalem ont certainement fortement affecté Guillaume. Ne connaissant pas le sort d'Armand de Périgord, l'ordre est alors dirigé par le vice maître Guillaume de Roquefort. Cette même année Louis IX tombe très gravement malade et, en reprenant ses esprits, fait le vœux de se croiser. Les commanderies templières et hospitalières d'Occident font tout leur possible pour envoyer argent et renforts en Orient, ce dont elles sont remerciées par le pape Innocent IV. Sous bonne garde templière, le pape appelle à la croisade lors du 13ème concile général œcuménique de Lyon en juin 1245 . Il est fort probable que Guillaume ait aidé Alphonse de Poitiers à préparer activement la septième croisade, Renaud de Vichiers alors maître de France s'occupant pour sa part de négocier la location de navires à Marseille.
En mai 1246 Guillaume est à Fontevraud et l'ordre reçoit des terres autour de Montsoreau.
Le 2 juin 1246, Isabelle d'Angoulème, sur son lit de mort à Fontevraud où elle sera inhumée, adresse une supplique à Louis IX concernant ses enfants successeurs du comté de la Marche. Cette supplique est confiée à 5 hommes de confiance dont, en premier lieu, notre Guillaume toujours précepteur d'Aquitaine à cette date.
En 1246 Armand de Périgord meurt en captivité (ou du moins sa mort devient officielle), les négociations en vue de sa libération n'ayant pas abouti. Richard de Bures est nommé Grand Commandeur donc chargé d'organiser l'élection d'un nouveau grand maître pour l'ordre.
Les Carismiens (Iraniens) qui avaient été chassés par les Tartares (Mongols) de Gengis Khan, s'étaient mis sous la protection du sultan d'Egypte Al-Malik as-sâlih Najm ad-Dîn Ayyûb (1207-1249). Avec cet appui ils dévastent alors la Terre Sainte et prennent Jérusalem. En 1247 ils sont définitivement battus et chassés de Terre Sainte.
Guillaume accède alors à la maîtrise de l'ordre en été-automne 1247 logiquement élu par le chapitre général réuni à Château Pèlerin. C'est le 17ème Grand Maître de l'Ordre. En mai 1247 Guillaume II Longue-Épée comte de Salisbury (1212-1250) petit fils d'Henry II se croise avec Geoffroy de Lucy que nous retrouverons à la bataille de Mansourah aux cotés de Guillaume de Sonay. C'est cette même année le 13 octobre que Guillaume fait parvenir avec le maître des hospitaliers Guillaume de Châteauneuf un messager templier à Henry III, roi d'Angleterre, portant un vase de cristal contenant du sang du Christ. L'authenticité de cette relique est attestée par une lettre du patriarche de Jérusalem Robert de Nantes. Guillaume désirait certainement, par ce geste, inciter Henry III à accorder plus de soutiens à la croisade. Henry III porta personnellement, en procession le saint sang de Saint Paul jusqu'à Westminster.
Guillaume a certainement assisté à la chute de Tibériade, du mont Thabor, de Belvoir et d'Ascalon toujours en 1247. Selon les termes du traité de reddition de Louis IX à la fin de la septième croisade, les possessions franques avant les combats se composaient de Jaffa, Arsur, Césarée, Château Pèlerin, Haïfa, Caymont, Nazareth, Safed, Beaufort, Tyr, Le Toron et Sidon soit une mince bande de terres le long du littoral.
Pâques 1248 Jehan de Joinville quitte son château pour rejoindre la septième croisade dont il sera le principal chroniqueur.
Le 6 avril 1248, un messager de Guillaume de Sonay, alors maître de l'ordre, frère Jacques de Turrisellis, négocie avec le doge de Venise, Jacob Teupolum, une indemnité à verser aux marchands vénitiens en compensation des dommages qu'ils avaient eu suite à la prise de la ville de Senj (Croatie).
Le 12 juin 1248, Louis IX reçoit les insignes de la croisade à l'abbaye de Saint-Denis. Le 25 (ou 28) aout, il s'embarque à Aigues-Mortes avec une flotte de 1500 navires qui rejoindront Limassol à Chypre. Louis est accompagné de la reine Marguerite de Provence, Robert d'Artois, sa femme et Charles d'Anjou ses frères, Jean de Joinville son biographe et Renaud de Vichiers en tant que Maréchal de l'ordre. Le roi est accueilli à Chypre le 28 septembre 1248 par Henri Ier de Lusignan (les premiers navires étant arrivés depuis le 17).
Vers octobre 1248 (selon Röhricht) Guillaume de Sonay et le Maréchal de l'Hopital Hugo de Jury écrivent alors à Louis IX en relâche à Chypre que le sultan d'Egypte Al-Malik as-sâlih Najm ad-Dîn Ayyûb qui menaçait Jaffa et Césarée était prêt à négocier la paix avec les croisés et leur avait envoyé un émir. Des bruits dans l'entourage de Louis IX laissent entendre que Guillaume était lui même à l'origine de la négociation. Louis IX n'étant pas disposé à reculer, reproche vertement à Guillaume sa médiation supposée et lui interdit formellement de donner suite au projet.
En décembre 1248, pendant la maîtrise de Guillaume, Ferdinand III, aidé par les templiers, tentèrent un stratagème inédit et réussirent à prendre Séville après 16 mois de siège.
Selon la chronique des gestes des chiprois (mais ce document tardif comporte beaucoup de fautes) Guillaume aurait appareillé d'Acre peu de temps après l'arrivée du roi à Chypre, avec des renforts, afin d'assister au conseil royal qui décida d'hiverner à Chypre. Guillaume et les hospitaliers étaient favorables à un débarquement à Acre mais ce n'était pas l'avis d'Henri Ier de Lusignan qui menaçait de ne pas se joindre à la croisade s'il n'était pas envisagé un débarquement en Egypte. Selon ces mêmes gestes des chiprois, après les fêtes pascales (4 avril 1249), Louis IX envoya la reine Marguerite de Provence à Acre puis à Château Pèlerin, chez les templiers, pour y accoucher en sécurité. Le bébé du nom de Jean ne survécut pas. Au minimum Guillaume de Sonay fut consulté et donna son accord. Il se peut même qu'il aie escorté la reine à cette occasion.
Un premier essai d'appareillage depuis Limassol en février échoue suite à des difficultés de location de navires dues aux escarmouches navales au large d'Acre que se livraient Pise et Gènes.
Le 12 mai 1249, Guillaume signe une reconnaissance de dette à Limassol Chypre chez le notaire G. Vecchio pour une somme empruntée à des banquiers vénitiens (10 000 besans syriens soit 3750 livres tournois) d'ordre et pour compte de la comtesse Yolande de Bourbon dont le mari venait de décéder à Chypre pendant le séjour des troupes de la septième croisade. Cette transaction était faite avec la caution de Louis IX et à sa demande. Le même jour a lieu un grand conseil templier sous la tente du précepteur de la terre d'Outre mer avec Guillaume de Sonay Maître de l'ordre, Renaud de Vichiers Maréchal, Etienne de Haute Tour précepteur de la Terre d'Outre mer, Jacques de Montignoso, le précepteur d'Uspri (?), Ferrand l'Espagnol précepteur d'Antioche, Geoffroy de Mural précepteur militaire et Amaury Jaures drapier. Le conseil reçoit en mains propre la somme à remettre à Yolande de Bourbon.
La semaine suivante, le 20 mai, la flotte embarque pour Damiette mais la tempête la disperse. Seulement le tiers de la flotte arrive au large de Damiette le 4 juin, débarquement le 5, mort d'Hugues X de Lusignan (le mari d'Isabelle d'Angoulème) puis prise de la ville désertée le 6 sans combat. Il n'est pas certain que Guillaume aie participé à la prise de la ville, son bateau ayant pu être de ceux que la tempête a poussé vers Acre, mais il a dû être présent quelques jours après lors de la consécration de la cathédrale-mosquée à Marie. Un conseil royal suivit la prise de Damiette pour décider si l'on attaquerait Alexandrie ou directement le Caire (appelé Babylone par les croisés). A nouveau, l'option défendue par Robert d'Artois l'emporte sur d'autres plus sages.
Après la prise de Damiette, le 10 juin, Guillaume écrit à son ami Robert Sanford précepteur d'Angleterre pour lui relater la prise de la ville. Henry III avait en effet interdit à Robert Sanford de quitter l'Angleterre dès 1243 (Bulst Thiele note 6). Guillaume reçoit des biens dans Damiette pour le Temple.
Alors qu'il était à Damiette, Guillaume ordonne à Roncelin de Fos de rejoindre l'Espagne pour y être commandeur à la place de frère Palayo. La dure règle des templiers est particulièrement respectée par Guillaume lors du séjour à Damiette contrairement au relâchement général des troupes croisées. Des exemples de son intégrité sont cités dans la règle catalane et ce même en s'opposant à l'intervention de la reine Marguerite de Provence.
Juillet 1249, Guillaume Longue-Epée arrive à Damiette en renfort avec le contingent anglais. Après plusieurs exploits vers Alexandrie et la prise d'une riche caravane, il se brouille avec le bouillant comte Robert d'Artois, il quitte alors Damiette pour se réfugier à Acre chez les templiers ou les hospitaliers.
Guillaume fait lui aussi un voyage à Acre puisque le 1 octobre 1249 on le retrouve dans la maison communale des Génois où il signe le reçu concernant le remboursement des sommes prêtées à Yolande de Bourbon. Il assiste impuissant à 28 jours de combat naval entre Pisans et Génois au large de Saint Jean d'Acre. Guillaume, aidé des hospitaliers convint Jean d'Ibelin, seigneur d'Arsuf d'accepter la charge de gouverneur d'Acre que lui offrait Henry Ier de Lusignan. Jean d'Ibelin réussit à imposer la paix aux belligérants.
Mort du sultan Malik al-Salih Ayyoub le 23 novembre 1249 des suites d'une gangrène (et non d'un empoisonnement comme le pensait Joinville). Les sarrasins essayèrent de cacher cette mort qui fut apprise assez rapidement par les croisés. Le commandement des armées égyptiennes est confié à l'émir Fakr ed-din.
Louis IX rappelle à Damiette Guillaume de Sonay et Guillaume Longue-Epée qui assistent alors à l'arrivée des renforts accompagnant Alphonse de Poitiers. Un conseil royal se range derrière l'avis de Robert d'Artois qui exigeait l'attaque immédiate du Caire sans prendre Alexandrie. Le 20 ou 28 novembre 1249, c'est le départ pour le Caire via Mansourah. Premier campement à Fariskour (suivre sur la carte et le calendrier)
Le 7 décembre 1249 a lieu la bataille de Sharmesah entre les templiers et l'avant garde sarrazine. Le contingent templier est commandé par le maréchal Renaud de Vichiers. Il y eut 600 morts coté sarrasin. Il n'est pas dit si Guillaume a participé au combat. Le 13 décembre arrivée à Baramoun.
21 décembre 1249, arrivée devant Mansourah mais au nord du canal d'Aschmoun, comme lors de la croisade précédente en 1221. L'armée sarrasine est sur la rive opposée avec des engins lançant le feu grégeois (chats-châteaux). Au prix d'efforts inefficaces, Louis IX tenta de traverser en construisant un pont-chaussée sous le feu ennemi.
Le 23 décembre 1249 sévère attaque des sarrasins qui perdent de nombreux combattants. Le 25 décembre, les templiers prêtent main forte à Joinville pour sauver Pierre d'Avalon et son frère attaqués pendant le repas de Noël. Les escarmouches se font de plus en plus nombreuses.
Le 8 février 1250 (mardi gras) avant l'aube, l'avant garde des croisés passe avec beaucoup de difficultés le bras du Nil au gué de Salman. Le contingent templier était commandé par Guillaume. La troupe était guidée par un traitre bédouin "converti" mais surtout grassement récompensé. Le comte d'Artois et le détachement templier tuent alors l'émir Fakr ed-din surpris à la sortie de son bain. Une vive dispute oppose alors Robert d'Artois partisan d'attaquer la ville de suite et Guillaume soutenu par Guillaume II Longue-Epée, commandant du détachement anglais, qui préféraient attendre la traversée du reste de l'armée comme l'avait exigé le roi Louis IX. Ce répits aurait permis de remettre en service les balistes ennemis afin de protéger les positions franques.
Cette violente dispute est restée célèbre et décrite par les chroniqueurs ainsi par tous les livres d'histoire relatant les croisades. A noter que pour Joinville l'altercation a lieu avant l'attaque de Mansourah et pour Matthieu Paris après avoir traversé une première fois la ville de Mansourah. Les templiers ne peuvent laisser Robert attaquer seul et entrent ou retournent dans la ville fortifiée. Après un moment de panique, les Sarrasins, encouragés par la résistance de la garde Baharite mameluk du sultan commandée par Bibars-Bendocdar, se ressaisissent et massacrent la quasi totalité des chevaliers qui étaient imprudemment entrés en ville dont Robert d'Artois (au combat pour Joinville, noyé en s'enfuyant pour Matthieu Paris). Guillaume Longue-Epée et 280 templiers font également partie des morts. Seulement trois templiers réussissent à s'enfuir par le fleuve dont notre Guillaume qui perdit un œil dans ce combat.
Le soir même, bien que blessé, Guillaume aide Joinville à empêcher un groupe de sarrasins de voler la tente que les templiers avaient assigné à Joinville. Le lendemain, il entreprend de fortifier les défenses en utilisant le bois des machines de guerre prises aux sarrasins.
Le 11 février 1250 l'ensemble des croisés survivants résistent lors d'une bataille acharnée commandée par Tûrân-Châh, fils de Malik al-Salih Ayyoub, près du canal Bahr Al-Saghîr sur le lieu même où l'émir Fakr-Eddin avait trouvé la mort. Guillaume reçoit une flèche dans son œil resté valide et expire peu après criblé de flèches. Renaud de Vichiers le remplacera très vite à la tête de l'ordre pour régler les négociations concernant le roi et les prisonniers.
Cette biographie montre combien nous sommes loin des légendes cathares ou ésotériques prêtées à Guillaume de Sonnac. Au contraire, nous voyons un attachement constant aux Plantagenets, aux Lusignan et à leur descendance.
La mort héroïque de Guillaume de Sonay que Matthieu Paris, pourtant avare de compliments à l'égard des templiers, qualifiait de « vir quidem discretus et circumspectus, in negotiis quoque bellicis paritus et expertus - homme discret et circonspect, autant qu'habile et expérimenté dans les affaires de la guerre», fut cité 60 ans après par Jacques de Molay lors du procès comme ayant accompli un acte susceptible d'illustrer la grandeur et l'exemplarité de l'ordre.
Voici donc la vie d'un héros qui, par ses qualités humaines, a accédé à la plus haute distinction de l'ordre des templiers. Même si beaucoup de projets se sont écroulés autour de lui (celui de l'empire Plantagenet ou la septième croisade), il a réussi ce qu'il avait toujours désiré, mourir en chevalier et en martyr pour son Dieu, en Terre Sainte.