L13 - Lettre reçue par Richard de Cornouailles

 

 

Date : 1250

Précision sur le document : Curieusement, cette lettre date correctement les évènements de février contrairement au corps de la chronique de Matthieu Paris !

Auteur : Jean chancelier de Richard de Cornouailles

Edition utilisée : « Matthaei Parisiensis, monachi santi Albani, Chronica Majora, Rerum Britannicarum medii aevi scriptores, vol V » éditée par Henry Richards Luard p. 165

Edition traduction : A. Huillard-Bréholles chez Paulin 1840 Tome 7 p. 102

Fiche Arlima ou CartulR :  Arlima

 

 

 

 

Absente autem die carniprivii ipso Soldano, et dimissis juxta flumen tentoriis, et numerosa multitudine in eisdem, per consilium cujusdam conversi quondam Sarraceni, dictus comes et magister Templi cum omnibus qui ibidem fuerunt fratribus transire fideliter edocentur ; fuit autem idem conversus ex parte comitis Atrabatensis, servus ejus. Ipsos autem sequebatur dominus Willelmus Longa-Spata cum suis, et milti alii, ita quod tertia pars totius exercitus censebantur. Qui omnes Nilum transierunt, et subito irruentes in Sarracenos viriliter dimicarunt, et factus est conflictus magnus. Tandem multis interfectis, videlicet universis Sarracenis quos tam in campo quam in tentoriis invenerunt, et facte utriusque sexus strage non modica, victoriam gloriosam optinerunt Christiani ; sed his non contenti comes et sui extiterant. Voluitque comes nimis protervus ulterius transire, scilicet ad quoddam casale Mansor dictum expugnandum, quod satis prope erat, negantibus et non consulentibus Templariis, multas incommoditates de fatigatione et laesione corporum suorum necnon et equorum et aliae assignantibus. Noluit autem dictus [comes] aliqua ratione redire nec sui, sed convitiis ortis ad dictum casale venientes hostes invaserunt vihiliter.


Le jour ou commence la privation de la chair, le soudan étant absent, et la nombreuse multitude de son armée étant répandue dans les tentes qui bordaient le fleuve, un ancien Sarrasin converti donna fidèlement connaissance d’un gué ; ce qui permit au dit comte, au maître du Temple et à tous les frères [Templiers], qui étaient présents, de traverser le fleuve. Or ce même converti faisait partie de la suite du comte d’Artois, et était son serf. Le seigneur Guillaume Longue-Épée, avec les siens, se mit à leur suite, ainsi que beaucoup d’autres, en sorte que cette troupe formait le tiers de toute l’armée. Tous passèrent le Nil, et, tombant tout à coup sur les Sarrasins, combattirent vaillamment, et une grande mêlée eut lieu. Enfin, après avoir tué beaucoup de monde, à savoir tous les Sarrasins qu’ils trouvèrent, tant dans la plaine que sous les tentes, et après avoir fait un grand massacre des deux sexes, les chrétiens obtinrent une victoire glorieuse ; mais le comte susdit et les siens ne s’en contentèrent pas. Le comte, homme fort arrogant, voulut pousser plus loin et aller prendre un certain village, nommé Mansor, qui était assez près de là, malgré les refus et les avis des Templiers, qui lui remontraient une foule d’incommodités, la fatigue et les blessures de leurs corps et de leurs chevaux, et d’autres choses encore. Mais le dit comte ni les siens ne voulurent s’en retourner pour aucun motif. Après une discussion pleine d’injures, on arriva au susdit village, et on attaqua vigoureusement les ennemis.